En réponse au lobbying puissant des firmes agro-industrielles qui commercialisent les semences génétiquement modifiées en mettant en avant les avantages économiques, environnementaux et sociaux de la culture d'OGM, l'association Les Amis de la Terre a souhaité analyser les performances de ces cultures au regard des 10 années d'existence de ces produits. Dans son rapport intitulé « Qui tire profit des cultures GM ? Analyse des performances des cultures GM dans le monde (1996 et 2006) », l'association explique qu'aucun OGM actuellement sur le marché ne bénéficie aux consommateurs, que ce soit en termes de prix ou de qualité. Comme l'indique Nnimmo Bassey des Amis de la Terre Afrique au Nigéria, les OGM n'ont apporté aucune solution à la faim et à la pauvreté en Afrique et ailleurs. La grande majorité des OGM cultivés actuellement sont utilisés comme aliments pour le bétail à prix élevé afin de fournir les populations des pays riches en viande.
Pour prouver ses allégations, l'association se base sur plusieurs études scientifiques et certains rapports notamment du ministère de l'agriculture nord-américains (USDA) qui auraient conclu que le rendement des cultures GM est inférieur ou, au mieux, équivalent, à celui des variétés non GM. Ce fut le cas d'ailleurs au Brésil et au Paraguay où la production de soja a connu une crise due à des rendements inférieurs aux attentes. Résultats, les cultivateurs ont beaucoup de mal à maintenir leurs moyens de subsistance. La société Monsanto qui commercialise le soja OGM incriminé a été obligée de réduire le montant des royalties qu'elle demande aux producteurs pour chaque kilo de soja produit. De même, le Ministère de l'environnement au Paraguay a trouvé des pertes plus importantes sur les cultures OGM que sur des variétés conventionnelles montrant ainsi que les OGM sont plus sensibles à la sécheresse. En Chine, c'est le coton résistant aux herbicides qui se montre moins avantageux que prévu. Dans son rapport, l'association cite une étude récente de l'Université de Cornell, qui a montré qu'en 2004 le revenu net des cultivateurs de coton Bt avait été très inférieur à celui des cultivateurs de coton non Bt. Ce résultat serait attribuable à l'apparition de ravageurs secondaires tels que les mirides, et à la nécessité d'appliquer de 15 à 20 fois plus de pesticides pour les tuer.
Ce même coton a très vite été abandonné en Indonésie par les producteurs qui se sont sentis lésés en constatant les mauvaises performances du coton Bt. Ils ont durement critiqué l'entreprise Monsanto pour ses fausses promesses, en particulier au vu du prix exorbitant des semences avec comme conséquence l'abandon de la commercialisation de coton Bt dans le pays.
Les Amis de la Terre expliquent également que les OGM n'entraînent pas la réduction de l'utilisation des pesticides. Aux États-Unis, trois principaux produits GM auraient provoqué une augmentation de l'usage de pesticides de 55.000 tonnes depuis 1996, avec une très forte augmentation du volume d'herbicides appliqués au soja, au coton et au maïs résistants aux herbicides. Le constat est similaire au Brésil : une étude menée par l'Instituto Brasileiro do Meio Ambiente e dos Recursos Naturais Renováveis (IBAMA), l'institution brésilienne pour la défense de l'environnement, montre que l'introduction du soja GM a fait augmenter l'utilisation de produits agrochimiques dans le pays. D'après cette étude, la consommation de glyphosate y a augmenté de 95 % entre 2000 et 2004. Pendant la même période, la consommation de tous les autres herbicides pris ensemble semble avoir augmenté de 29,8 %.
Donc pour l'association Les Amis de la Terre le résultat est clair : du moment qu'aucune étude détaillée n'analyse les performances des produits GM dans tous les pays qui les commercialisent, les avantages présumés de ces produits restent discutables. Pour l'association les OGM ne profitent pour l'instant qu'aux entreprises qui commercialisent les semences.
Concernant l'Europe, l'association semble confiante : bien que les surfaces plantées de produits transgéniques aient augmenté quelque peu, les perspectives à long terme ne sont pas alléchantes pour les semences de Monsanto. L'absence de marchés, les interdictions au plan national et les preuves de dommages écologiques garantissent que l'un des plus gros marchés du monde restera fermé à l'industrie biotechnologique.
En revanche elle reste prudente sur le sujet des biocarburants : pour l'instant, aucune variété approuvée de maïs ni aucun autre produit agricole transgénique n'ont été spécifiquement modifiés pour la production de biocarburants mais certaines entreprises sont en train de développer de nouveaux produits GM spécialement conçus pour ce marché.
La sortie du rapport des Amis de la Terre coïncide avec celui de l'ISAAA (International Service for the Acquisition of Agri-biotech Applications), organisation financée par l'industrie biotechnologique qui s'est donné comme mission la lutte contre la pauvreté et la promotion d'une agriculture soutenable par le développement des plantes génétiquement modifiées.